Le 24 janvier 2025 marquera la sortie de Prelude to the Divine Realm, une œuvre fascinante et intemporelle née de la collaboration entre deux virtuoses de la musique chinoise : Gao Hong, maître du pipa, et Zhao Xiaoxia, spécialiste émérite du guqin. Cet album est bien plus qu’une simple collection de compositions ; il s’agit d’un hommage vibrant à l’héritage spirituel de la Chine, un voyage sonore au cœur de la mythologie et des arts ancestraux.
Depuis l’aube de sa civilisation, la Chine a embrassé une vision profondément spirituelle du monde, où les frontières entre les mortels et les divins étaient poreuses. Selon les légendes, les arts – qu’il s’agisse de la poésie, de la calligraphie, de la danse ou de la musique – sont des cadeaux offerts par les dieux à l’humanité. Prelude to the Divine Realm s’inscrit dans cette tradition en tant qu’acte de gratitude envers ces dons divins, traduisant en musique la richesse intemporelle de cette culture. L’album s’appuie sur des interprétations uniques et novatrices de morceaux traditionnels chinois, transcendées par l’improvisation et le dialogue subtil entre deux instruments emblématiques : le pipa et le guqin. Ensemble, ils tissent une trame sonore qui transporte l’auditeur dans un univers où le temps et l’espace n’existent plus.
Une Rencontre à Pékin : Le Berceau de la Création
C’est par une froide journée enneigée à Pékin, au cœur du Miao Temple Studio, que Gao Hong et Zhao Xiaoxia ont donné naissance à cet album. En dépit des contraintes de temps – Gao venait d’atterrir après une tournée de 11 villes, tandis que Zhao se préparait pour un concert le soir même – les deux musiciennes ont su capturer l’instant avec une maestria rare.Le studio, empreint de l’histoire et de la beauté intemporelle de Pékin, a servi de cadre idéal pour cette rencontre. Les musiques enregistrées, fruit de discussions musicales spontanées et d’improvisations délicates, revisitent les classiques de la tradition chinoise avec une sensibilité nouvelle. Le fait que cet album ait été enregistré en une seule après-midi témoigne de la maîtrise et de l’alchimie entre les deux artistes.
Gao Hong et Zhao Xiaoxia : Les Voix de la Tradition
Gao Hong, souvent décrite comme une visionnaire du pipa, a une carrière jalonnée de succès internationaux. Formée sous la direction du maître Lin Shicheng au Conservatoire central de musique de Pékin, elle a su marier tradition et innovation, explorant des genres aussi variés que le jazz afro-américain, le bluegrass ou encore la musique klezmer. Sa créativité sans bornes se reflète dans ses improvisations, où le pipa devient un pinceau peignant des paysages sonores oniriques.
Zhao Xiaoxia, quant à elle, est une figure incontournable du guqin, cet instrument millénaire chargé de spiritualité. Disciple du célèbre professeur Li Xiangting, elle s’est produite avec des orchestres prestigieux à travers le monde, du Philharmonique de Tokyo au Symphonique des Pays-Bas. Zhao incarne un pont entre la tradition et la modernité, insufflant une sagesse ancienne à ses interprétations tout en explorant de nouvelles dimensions sonores.
Les Pièces Maîtresses de l’Album
Chaque morceau de Prelude to the Divine Realm raconte une histoire, mêlant les échos du passé à des réflexions universelles sur la nature et l’expérience humaine. Parmi les compositions remarquables, on trouve :
- « Drunken Immortals » (飲中仙) : Inspiré du légendaire Ruan Ji de la dynastie des Trois Royaumes, ce morceau traduit un état d’ébriété transcendantale. Le guqin et le pipa y capturent la dualité entre rêve et réalité, évoquant des étoiles qui dansent dans le ciel nocturne.
- « Snow Like Jade » (雪如玉) : Une ode à la sérénité hivernale, où le guqin évoque un lac glacé tandis que le pipa imite la neige tourbillonnant dans l’air. Ce morceau invite à un état de contemplation et de silence intérieur.
- « Plum Blossoms Swinging in the Breeze » (清梅蕩幽枝) : Rendition inédite d’un classique de la dynastie Tang, cette pièce célèbre la résilience du prunier, symbole de pureté et de force face à l’adversité.
- « Portal to the Clouds » (步虛九霄) : Un solo de guqin d’une profondeur saisissante, qui guide l’auditeur vers un abîme infini, où chaque note ouvre une porte vers des souvenirs ancestraux et des vérités cachées.
- « Jade Beads Tumbling into the Green Lake » (瓊珠落碧湖) : Ce solo de pipa, d’une délicatesse cristalline, raconte la chute d’une perle de jade dans un lac paisible, métaphore de la quête intérieure et de la paix retrouvée.
Une Symphonie Spirituelle
Prelude to the Divine Realm n’est pas seulement un album ; c’est une expérience. À travers le dialogue subtil entre le pipa et le guqin, Gao Hong et Zhao Xiaoxia nous plongent dans un univers musical qui transcende les frontières culturelles et spirituelles. Loin d’être un simple hommage au passé, cet album est une invitation à la réflexion sur notre connexion avec le divin et la beauté intemporelle du monde qui nous entoure.Que l’on soit un amateur de musique traditionnelle chinoise ou un néophyte curieux, Prelude to the Divine Realm offre une porte ouverte vers un royaume sonore inoubliable, où chaque note est un pont entre l’éphémère et l’éternel.
Découvrez les artistes de cet album
Gao Hong : Une virtuose de la pipa au parcours exceptionnel
Née dans la ville historique de Luoyang, en Chine, Gao Hong a traversé de nombreux défis pour devenir l’une des musiciennes les plus respectées dans le monde. Son parcours, mêlant travail acharné et résilience, est indissociable de l’histoire tumultueuse de son pays.Fille d’un fonctionnaire déchu pendant la Révolution culturelle, Gao a grandi sous la houlette de sa mère, professeur de musique. À seulement 12 ans, elle quitte sa famille pour rejoindre une troupe de chant et de danse dans la province du Hebei, à 600 kilomètres de chez elle. Malgré son jeune âge et les sacrifices que cela impliquait, Gao y voit une opportunité inespérée dans une Chine en pleine tourmente.
Déterminée à exceller, Gao passait des heures à pratiquer la pipa, un luth chinois traditionnel, souvent dans la salle des chaudières pour ne pas déranger ses collègues. Ce dévouement lui vaut le surnom affectueux de « petit chat noir », en raison des traces de charbon qui se déposaient sur son visage et accentuaient son sourire.À 22 ans, Gao intègre le prestigieux Conservatoire central de musique de Pékin, où elle étudie auprès du maître Lin Shicheng, une figure légendaire de la pipa. Diplômée avec honneurs, elle poursuit sa carrière internationale et s’installe aux États-Unis, où elle conquiert les scènes les plus renommées : Carnegie Hall, le Lincoln Center Festival, le Festival de jazz de San Francisco et des festivals à Paris, Milan, Perth ou encore Caen. Gao s’est également illustrée avec des orchestres prestigieux comme le Minnesota Orchestra et le Saint Paul Chamber Orchestra. En 2017, elle entre dans l’histoire en devenant la première musicienne chinoise à jouer l’hymne national américain à la pipa lors d’un match de NBA.
Gao Hong est l’une des rares artistes à exceller tant comme interprète que comme compositrice. En 2005, elle devient la première musicienne traditionnelle à recevoir la prestigieuse Bush Artist Fellowship. En 2018, le Ordway Center lui décerne le Sally Award pour sa contribution exceptionnelle aux arts. En 2019, elle établit un record unique en remportant pour la cinquième fois une McKnight Artist Fellowship.Son travail pédagogique est également remarquable : Gao est l’auteure du premier manuel de pipa publié en anglais, distribué dans le monde entier par Hal Leonard. En 2021, ARC Music a réédité l’album Hunting Eagles Catching Swans, réalisé avec son mentor Lin Shicheng, qui remporte deux médailles d’or aux Global Music Awards et est sélectionné par Songlines Magazine parmi les meilleurs albums du monde.
En 2022, la ville de St. Paul, Minnesota, proclame le 3 avril « Gao Hong Day » pour célébrer ses 50 ans de carrière musicale. Ce concert anniversaire à l’Ordway Center est diffusé dans l’émission Performance Today, l’un des programmes les plus populaires de musique classique aux États-Unis.
Gao Hong continue de briller avec des collaborations innovantes. Son album House of Friendship, enregistré avec le joueur de kora sénégalais Kadialy Kouyaté, et Alondra, avec le guitariste flamenco Ignacio Lusardi Monteverde, remportent quatre médailles d’or aux Global Music Awards en 2023 pour leur créativité et leur virtuosité.Parallèlement à sa carrière musicale, Gao s’implique activement dans les institutions culturelles. Elle siège au conseil de l’American Composers Forum et de Minnesota Citizens for the Arts, et est membre votant des Grammy Awards. Elle enseigne également à Carleton College, où elle dirige l’Ensemble de musique chinoise, tout en étant professeure invitée au Conservatoire central de musique de Chine.
Pour Amy Klobuchar, sénatrice américaine, Gao Hong est une figure qui inspire : « Depuis plus de 50 ans, la musique de Gao Hong émeut et touche des milliers de personnes à travers le monde. En tant que l’une des plus grandes joueuses de pipa au monde, elle incarne l’excellence musicale, la créativité et le dévouement. »De la salle des chaudières de Hebei aux scènes internationales, Gao Hong est bien plus qu’une musicienne : elle est un pont entre les cultures et une ambassadrice infatigable de la tradition et de l’innovation.
Zhao Xiaoxia : L’ambassadrice mondiale du guqin, entre tradition et modernité
Zhao Xiaoxia est une figure emblématique du guqin, la cithare chinoise millénaire. À la fois gardienne des traditions et innovatrice audacieuse, elle a su hisser cet instrument ancien sur la scène internationale, tout en l’intégrant dans des projets contemporains audacieux. À travers ses multiples responsabilités, notamment en tant que présidente de l’Académie Zixia Guqin, vice-présidente de la Société Internationale du Guqin et directrice exécutive de l’Académie Chinoise de la Culture du Guqin, Zhao Xiaoxia s’emploie à préserver et à réinventer cet art.Elle est également l’auteure de Preliminary Examination of Guang Ling Verse et l’éditrice des cours bilingues Easy Learning of Chinese Music – Guqin et 12 Lessons for Quick Introduction to Guqin, contribuant ainsi à la diffusion pédagogique de cet art musical.
Zhao Xiaoxia commence à étudier le guqin à l’âge de 9 ans sous la direction de Yu Qinqin, une figure emblématique du style du Sichuan. En 1995, elle devient l’élève du maître Li Xiangting, professeur au Conservatoire Central de Musique, où elle enseigne aujourd’hui comme tutrice de master en guqin, perpétuant l’héritage de son mentor.La carrière de Zhao Xiaoxia est marquée par des performances prestigieuses et des récompenses majeures. En 2007, elle remporte la médaille d’or dans la catégorie guqin lors de la Compétition nationale d’instruments traditionnels chinois organisée par CCTV. En 2014, elle joue pour les chefs d’État lors du sommet de l’APEC, recevant des éloges unanimes.
En 2016, elle se distingue en jouant pour des leaders mondiaux à la cérémonie de remise des prix de l’UNESCO et au sommet du G20 de Pékin. Deux ans plus tard, elle interprète Three Stanzas of Plum-blossoms lors du sommet de Qingdao de l’Organisation de coopération de Shanghai, marquant une nouvelle fois les esprits par la profondeur et la subtilité de son jeu.Zhao Xiaoxia ne cesse de mêler tradition et innovation. En 2018, elle collabore avec l’artiste visuel Asbo et le producteur américain Soulspeak pour Wan Who?, une installation musicale multimédia présentée lors du festival SXSW. L’année suivante, elle fait une apparition remarquée lors de l’exposition horticole mondiale de Pékin et joue pour le président chinois à l’ouverture de la Coupe du monde de basketball, interprétant People are Everything, un morceau porteur d’un message de coexistence et de prospérité partagée.
Soliste reconnue, Zhao Xiaoxia a donné des concerts dans des dizaines de pays et collaboré avec des orchestres prestigieux tels que le New Zealand Symphony Orchestra, le Sydney Symphony Orchestra, le Netherlands Symphony Orchestra, le Tokyo Philharmonic Orchestra et l’Orchestre National de Chine. Depuis 2011, elle participe également à la tournée mondiale du compositeur Tan Dun, célèbre pour sa trilogie Martial Arts.Toujours en quête d’innovation, elle a enregistré plus de dix albums, dont Guqin, primé pour la meilleure production et le meilleur art aux Fever Album Chart Awards en 2018, ainsi que Yu Meiren Qin Ge, lauréat du prix gouvernemental le plus prestigieux en 2016. Par ailleurs, elle a contribué à la composition de musiques pour des séries télévisées, comme Confucius.
En hommage à ses contributions exceptionnelles, Zhao Xiaoxia a été nommée citoyenne d’honneur de la Seine en France. Ses performances, tant pour des chefs d’État que dans des projets expérimentaux, témoignent de sa capacité à réinventer le guqin pour le XXIᵉ siècle.
Zhao Xiaoxia n’est pas seulement une virtuose du guqin : elle est une ambassadrice culturelle, mêlant harmonieusement tradition et modernité pour faire rayonner cet instrument chinois à l’échelle mondiale. « Son parcours incarne l’union de l’authenticité et de l’innovation, prouvant que la richesse de la culture traditionnelle chinoise peut s’intégrer dans le paysage artistique contemporain », souligne un critique musical.
À travers son enseignement, ses collaborations internationales et ses explorations créatives, Zhao Xiaoxia fait du guqin un langage universel, capable de toucher les cœurs et de transcender les frontières culturelles.
Pour en savoir plus :
Site web de Gao Hong : http://www.chinesepipa.com/
Facebook : https://www.facebook.com/gao.hong.56
Youtube : https://www.youtube.com/@GaoHongPipa/videos
Instagram : https://www.instagram.com/gao_hong_pipa/
Spotify : https://open.spotify.com/artist/2J3alprYxufiXHMgSN5f14
Youtube (Zhao Xiaoxia) : https://music.youtube.com/channel/UCj_W_6I2WtJWfkiBI7JmCLQ
Spotify (Zhao Xiaoxia) : https://open.spotify.com/artist/2SDYPXMZ1bU9tIpkTTmRPd