Le mot Pâques vient du latin Pascha, lui-même issu du grec Paskha, emprunté à l’hébreu Pessa’h (ou Pesach), qui signifie « passage ». Cette racine fait référence à l’épisode biblique de l’Exode, lorsque l’ange exterminateur « passe au-dessus » des maisons des Hébreux, épargnées car marquées du sang d’un agneau. Cette idée de « passage » est au cœur du sens spirituel de la fête. En français, on écrit Pâques avec une majuscule et un « s » lorsqu’il s’agit de la fête religieuse (qu’elle soit chrétienne ou juive). Le pluriel viendrait de la superposition de plusieurs jours ou rites festifs. En revanche, lorsqu’on parle de traditions populaires — comme les œufs de Pâques —, on utilise une minuscule et un « s ».
Les racines juives de Pâques – La Pâque juive, Pessa’h, est l’une des fêtes majeures du calendrier hébraïque. Elle dure huit jours (sept en Israël) et commémore la sortie d’Égypte relatée dans le livre de l’Exode. Dieu, par l’intermédiaire de Moïse, libère les Hébreux de l’esclavage après une série de dix plaies. Lors de la dernière, la mort des premiers-nés, les foyers hébreux sont épargnés grâce au sang d’un agneau sacrifié apposé sur les linteaux des portes. Durant cette période, les familles juives célèbrent le séder de Pessa’h, un repas rituel au cours duquel les mets symbolisent à la fois la souffrance et la délivrance : herbes amères, pain sans levain (matzah), os d’agneau, entre autres. La fête prend alors une forte dimension historique, spirituelle et communautaire.
Pâques dans le christianisme : la résurrection de Jésus-Christ – Pour les chrétiens, Pâques célèbre la victoire de la vie sur la mort. Selon les Évangiles, Jésus est crucifié le vendredi (Vendredi saint), mis au tombeau, puis ressuscité le troisième jour, un dimanche. Sa résurrection est le fondement même de la foi chrétienne : elle atteste qu’il est le Fils de Dieu et vainqueur de la mort. Les premiers chrétiens, issus du judaïsme, ont vu dans la mort de Jésus une correspondance avec l’agneau pascal. Jésus est reconnu comme l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde. Sa résurrection inaugure une nouvelle alliance entre Dieu et l’humanité.
Dans la tradition protestante, notamment réformée et évangélique, Pâques est le cœur battant de la foi. Martin Luther affirme que sans la résurrection, la foi est vaine. L’accent est mis sur la justification par la foi et la grâce : Jésus, par sa mort et sa résurrection, offre la vie éternelle à ceux qui croient. Les cultes de Pâques dans les Églises protestantes sont marqués par la lecture de la Bible, des prédications centrées sur le message pascal, et des chants de joie. Dans les Églises évangéliques, des baptêmes sont souvent organisés ce jour-là, symbolisant la mort à soi-même et la renaissance en Christ.
Comme l’explique le pasteur Jean-François Bussy, de l’Église protestante unie de Belgique :
« Pâques, c’est le centre de la foi chrétienne. La croix est comme une porte que Jésus a franchie pour nous entraîner dans la vie. La Résurrection, c’est le cœur du message, mais aussi une réalité existentielle : ce que nous vivons dans la foi peut nous traverser, nous transformer. »
Les célébrations protestantes, souvent empreintes de sobriété et d’authenticité, s’accompagnent de gestes symboliques forts : accueil de la lumière, partage du pain, et proclamation communautaire : « Christ est ressuscité ! Il est vraiment ressuscité ! »
Comment fixe-t-on la date de Pâques ? – Pâques est une fête mobile, fixée selon un calcul défini au concile de Nicée en 325 : elle est célébrée le premier dimanche suivant la pleine lune qui suit l’équinoxe de printemps. Elle peut donc tomber entre le 22 mars et le 25 avril. Les Églises orthodoxes, qui suivent le calendrier julien, la célèbrent souvent plus tard que les catholiques et protestants. Des discussions œcuméniques sont en cours pour une date commune, en signe d’unité.
Les pratiques selon les confessions chrétiennes
- Catholiques : une semaine sainte dense avec messes, lavement des pieds, vénération de la croix, et vigile pascale. Symboles forts : feu nouveau, cierge pascal, eau baptismale.
- Protestants : cultes sobres mais profonds, centrés sur la lecture de la Passion, la Sainte Cène, et le chant communautaire. Chez les réformés, Pâques est souvent le moment spirituel le plus intense de l’année.
- Évangéliques : célébrations joyeuses avec musique moderne, témoignages et baptêmes, parfois en plein air. L’expérience personnelle de la foi est mise en avant.
- Orthodoxes : long jeûne, vigile à minuit, chants byzantins, icônes, et proclamation communautaire : « Christ est ressuscité ! »
- Églises orientales : traditions spécifiques mêlant culture locale et liturgie ancienne, parfois en araméen ou en syriaque.
Traditions populaires
Les œufs, lapins et chasses : Les œufs, symboles universels de vie et de renaissance, étaient interdits pendant le Carême. On les conservait puis les consommait à Pâques. Au XIXe siècle, ils sont progressivement remplacés par des œufs en chocolat.
Le lapin de Pâques, venu des traditions germaniques, incarne la fécondité et le renouveau. Il est devenu le messager qui apporte les œufs aux enfants.
Les chasses aux œufs, populaires bien au-delà des cercles religieux, renforcent le caractère festif et familial de la fête.
Traditions régionales
- Alsace : arbres à œufs, décorations florales, Lammele (gâteau en forme d’agneau), fortes racines protestantes.
- Hongrie : aspersion parfumée des femmes, pâtisseries à la levure, repas à base de jambon et œufs.
- France : cloches « revenues de Rome », gigot d’agneau, grand repas familial.
- Belgique : traditions proches de la France, avec aussi des cultes à l’aube dans certaines communautés protestantes flamandes.
- Suisse : cultes matinaux, gâteaux de Pâques, traditions rurales encore vivaces.
Cuisine de Pâques
- Agneau pascal : rôti ou en gâteau (Alsace)
- Œufs farcis, brioches, pain azyme chez certains protestants
- Gâteaux-nids, desserts chocolatés en forme symbolique
Musiques pascales
La musique accompagne et amplifie la solennité de la fête :
- Cantates de Bach, très appréciées dans le monde luthérien
- « Hallelujah » du Messie de Haendel
- Chants évangéliques contemporains : « Il vit, je sais qu’il vit », « Parce qu’il vit »
- Chœurs orthodoxes, riches en émotions et en spiritualité
Pâques, bien au-delà d’une fête printanière, est le sommet de l’espérance chrétienne. Elle unit mémoire de la libération, victoire sur la mort, rassemblement familial et transmission spirituelle. Dans la tradition protestante, elle demeure le cœur vibrant de l’Évangile, affirmant que Christ est vivant — aujourd’hui encore.