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Atlas des oiseaux à Bruxelles : quand on laisse de la place au vivant, la biodiversité répond

Quinze ans après la précédente édition, Bruxelles Environnement vient de publier une nouvelle mise à jour de l’Atlas des oiseaux nicheurs de la Région de Bruxelles-Capitale. Un document de référence, réalisé en collaboration avec Natagora et Natuurpunt, qui offre une photographie précieuse — et parfois dérangeante — de l’état de l’avifaune dans notre capitale. Le constat est clair : là où Bruxelles protège, restaure et renature, les oiseaux reviennent. Là où elle artificialise, densifie et imperméabilise, certaines espèces disparaissent, parfois définitivement.

Vanneau Huppé

Un travail de terrain colossal et citoyen

Entre le printemps 2022 et l’hiver 2025, près d’une centaine d’ornithologues volontaires ont arpenté Bruxelles, quartier par quartier, parc par parc, friche par friche. La Région a été découpée en 198 carrés d’un kilomètre carré, chacun suivi par un observateur chargé d’identifier les espèces nicheuses et hivernantes, d’estimer leurs effectifs et de récolter des preuves solides de nidification. Ce travail de longue haleine s’inscrit dans une démarche scientifique rigoureuse, portée par Aves, le pôle ornithologique de Natagora, en collaboration avec Natuurpunt Studie, dans le cadre d’un marché public confié par Bruxelles Environnement. Il s’agit du troisième atlas régional, après ceux de 1989-1991 et de 2000-2004. Trente années de recul, donc, pour mesurer les tendances de fond.

Chouette Hulotte

Des chiffres stables… qui cachent des basculements

Sur le papier, le nombre d’espèces nicheuses reste relativement stable : 102 espèces recensées, contre 103 lors du précédent atlas. Mais derrière cette apparente stabilité se cache une profonde recomposition. Quinze espèces — dont certaines déjà très fragiles il y a vingt ans — ont disparu du paysage bruxellois comme nicheuses. Parmi elles : la Linotte mélodieuse, la Mésange boréale, le Coucou gris, ou encore le Cygne noir et l’Ouette de Magellan pour les espèces exotiques. Dans le même temps, 14 nouvelles espèces se sont installées, à l’image du Canard chipeau, du Râle d’eau, de la Bouscarle de Cetti ou de plusieurs espèces de goélands. Un signe que la ville reste capable d’accueillir du vivant… à certaines conditions.

La Mésange boréale Poecile montanus a disparu de Bruxelles en tant qu’espèce nicheuse. Son déclin est généralisé en Belgique.

Bonne nouvelle : les milieux humides se portent mieux

C’est l’un des enseignements les plus encourageants de l’Atlas : les oiseaux liés aux milieux aquatiques progressent. Étangs restaurés, berges renaturées, amélioration de la qualité de l’eau, meilleure gestion des zones humides… Les politiques publiques menées ces dernières années portent leurs fruits. Les carrés situés le long du canal affichent aujourd’hui une richesse spécifique supérieure à celle observée il y a vingt ans. Une preuve tangible qu’en milieu urbain aussi, la biodiversité peut rebondir lorsque l’on fait les bons choix.

Buse Variable

Mais un signal d’alarme pour les milieux ouverts

À l’inverse, l’Atlas dresse un constat préoccupant pour les milieux ouverts et semi-ouverts : friches urbaines, pelouses pionnières, terrains non bâtis, zones agricoles résiduelles. Ces espaces, souvent considérés à tort comme « vides » ou « en attente de projet », sont en réalité des réservoirs de biodiversité essentiels. Ce sont précisément ces milieux qui s’effondrent le plus rapidement. Les petits passereaux insectivores spécialisés y déclinent fortement, et certaines espèces ont désormais disparu de Bruxelles. En cause : la fragmentation des habitats, l’urbanisation galopante et l’artificialisation des sols. Aujourd’hui, plus de la moitié du territoire bruxellois est imperméabilisé. Un chiffre lourd de conséquences pour le vivant… mais aussi pour la qualité de vie des habitants.

Geai des Chènes

Une prise de conscience qui s’impose, enfin

Ces résultats s’inscrivent dans un contexte politique et juridique en pleine évolution. L’Union européenne vise désormais le zéro artificialisation nette à l’horizon 2050, y compris en milieu urbain, et impose la restauration des habitats dégradés. À Bruxelles, un signal fort a été envoyé en octobre dernier, lorsqu’un tribunal a reconnu la vulnérabilité des derniers espaces ouverts, en imposant un moratoire climatique sur l’urbanisation de terrains non bâtis de plus de 0,5 hectare. Une décision exceptionnelle, révélatrice des limites du cadre d’aménagement actuel.

Le PRAS face à ses responsabilités

Les données de l’Atlas renforcent une évidence : le Plan Régional d’Affectation des Sols (PRAS) doit être revu en profondeur. Pour Natagora, cette révision doit reconnaître les friches comme de véritables milieux écologiques, intégrer les continuités écologiques comme des éléments structurants de la ville, et cesser de considérer chaque espace non bâti comme une opportunité foncière à exploiter. L’Atlas le démontre sans ambiguïté : là où la Région protège et restaure, les espèces répondent. Là où les habitats disparaissent, elles s’éteignent.

Moineau Domestique

Un outil scientifique… et politique

Au-delà des chiffres, cet Atlas est un outil d’évaluation des politiques publiques menées depuis vingt ans. Il permet d’identifier les sites clés pour l’avifaune — la Forêt de Soignes, le Neerpede, le Domaine royal de Laeken — et de préparer les actions futures pour améliorer l’état de conservation des espèces les plus menacées.Une analyse des données hivernales et une publication complète, incluant cartes et effectifs des oiseaux nicheurs et hivernants, sont attendues dans les prochains mois. Elles viendront compléter ce diagnostic déjà sans appel.

Après avoir disparu de Bruxelles dans les années 1950, le Corbeau freux fait son retour. Plusieurs colonies se sont installées pour un total de 180 à 229 nids.

Une question de choix collectifs

Bruxelles n’est pas condamnée à devenir un désert biologique. Elle peut rester — ou redevenir — une ville vivante. Mais cela suppose des choix clairs, assumés, et parfois courageux. L’Atlas des oiseaux nicheurs nous rappelle une vérité simple : la biodiversité n’est pas un luxe, ni un supplément d’âme. Elle est un indicateur de la santé de nos territoires… et de notre capacité à penser la ville autrement.

L’Atlas des oiseaux nicheurs de Bruxelles est à télécharger ici : https://document.environnement.brussels/opac_css/elecfile/Atlas-des-oiseaux-nicheurs-de-la-RBC_2022-2024

Natagora : https://www.natagora.be/

Bruxelles Environnement : https://environnement.brussels/

Natuurpunt : https://www.natuurpunt.be/

Perruche à Collier

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