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Mary Kenneth Keller : Une pionnière de l’informatique et une visionnaire de l’éducation

Lorsque l’on évoque les figures marquantes de l’informatique, les noms qui reviennent souvent sont ceux de Bill Gates, Steve Jobs ou encore Alan Turing. Pourtant, l’une des pionnières du domaine reste largement méconnue : Mary Kenneth Keller. Première femme à obtenir un doctorat en informatique aux États-Unis, elle a été une figure majeure dans la démocratisation de l’informatique et une fervente promotrice de son potentiel éducatif.

De la congrégation religieuse à l’univers académique

Mary Kenneth Keller, née Evelyn Marie Keller le 17 décembre 1913 à Cleveland, Ohio, a tracé un chemin singulier. Dès son plus jeune âge, elle montrait un intérêt marqué pour l’apprentissage et la curiosité intellectuelle, une passion encouragée par sa famille. Sa décision de rejoindre les Sœurs de la Charité de la Bienheureuse Vierge Marie en 1932 fut motivée par un profond désir d’allier foi et éducation, et de contribuer à la société de manière significative. En 1932, elle entra chez les Sœurs de la Charité de la Bienheureuse Vierge Marie, une congrégation catholique. Elle prononça ses vœux en 1940 et obtint l’autorisation de poursuivre des études supérieures, ce qui était rare pour une femme à cette époque, encore plus pour une religieuse. Ses talents en mathématiques et en physique lui permirent d’accéder à plusieurs institutions académiques prestigieuses. Elle obtint un Bachelor of Science en mathématiques à l’université DePaul de Chicago en 1943, suivi d’un Master of Science en mathématiques et physique en 1953. Elle poursuivit ensuite ses études supérieures à l’université du Wisconsin-Madison, où elle obtint, en 1965, son doctorat en informatique. Sa thèse, intitulée Inductive Inference on Computer Generated Patterns, portait sur la construction d’algorithmes capables de réaliser des différenciations analytiques sur des expressions algébriques à l’aide du langage FORTRAN.

Une pionnière dans un domaine dominé par les hommes

À une époque où l’informatique était largement dominée par les hommes, Mary Kenneth Keller réussit à franchir les barrières systémiques pour se faire une place dans ce milieu. En 1961, elle participa à un programme d’été pour enseignants au Dartmouth College, une institution jusque-là réservée aux hommes. Sous la direction de John G. Kemeny et Thomas E. Kurtz, elle participa activement à la conception et à l’amélioration du langage de programmation BASIC (Beginners All-Purpose Symbolic Instruction Code). Son rôle spécifique consistait à collaborer sur la simplification des processus de programmation, rendant ainsi cet outil accessible aux étudiants et aux enseignants, et contribuant à poser les bases de son immense popularité dans les années 1970. Ce langage, conçu pour simplifier la programmation informatique, joua un rôle clé dans la démocratisation des ordinateurs personnels dans les années 1970. Le langage BASIC permit à des non-spécialistes, comme des étudiants et des enseignants, d’utiliser des ordinateurs sans nécessiter des connaissances avancées en mathématiques ou en programmation. Cette approche révolutionnaire correspondait parfaitement à la vision de Mary Kenneth Keller, qui voyait les ordinateurs comme des outils au service de l’éducation et de la réduction des inégalités d’accès au savoir.

Fondatrice et visionnaire

Après l’obtention de son doctorat, Mary Kenneth Keller fonda en 1965 le département d’informatique du Clarke College à Dubuque, dans l’Iowa, une institution catholique pour femmes. Sous sa direction, le département mit en place des programmes novateurs axés sur l’enseignement de la programmation et des bases de données, ainsi que des cours destinés à initier un public plus large, comme des enseignants et des professionnels en reconversion, à l’informatique. Ces initiatives reflétaient son engagement à rendre la technologie accessible à toutes et à tous. Ce fut l’un des premiers départements d’informatique dans une petite université, et elle le dirigea pendant vingt ans. Elle élabora des programmes pédagogiques innovants, pensés pour un large public, notamment des mères de famille et des adultes souhaitant se former ou se reconvertir.

En parallèle, elle fut une fervente promotrice de l’éducation par le biais des technologies informatiques. Elle participa à la création de l’Association of Small Computer Users in Education (ASCUE) en 1968 et écrivit plusieurs ouvrages sur le sujet. Lors d’une conférence en 1975, elle déclara : « Nous n’avons pas encore pleinement exploité l’ordinateur en tant qu’outil interdisciplinaire le plus extraordinaire jamais inventé. »

Un héritage durable

Mary Kenneth Keller dédia sa vie à la promotion des femmes dans le domaine de l’informatique, un sujet encore très actuel. Elle créa des opportunités concrètes pour celles qui étaient traditionnellement écartées de ce domaine, en lançant des bourses d’études spécifiquement destinées aux femmes et en organisant des ateliers de programmation accessibles à toutes. Son travail a inspiré des générations de chercheurs et d’ingénieurs, ouvrant la voie à une participation plus équitable dans le domaine de l’informatique. Son influence se poursuit aujourd’hui à travers des initiatives comme le Keller Computer Center à l’Université Clarke, un centre d’innovation qui offre des ressources en programmation et en analyse de données, ainsi que des ateliers pratiques pour étudiants et enseignants. De plus, la bourse d’études en informatique portant son nom soutient les étudiantes prometteuses, leur permettant de poursuivre des projets novateurs et de contribuer à des recherches qui façonnent l’avenir de la technologie. Plus largement, son rôle dans le développement du langage BASIC et son engagement pour l’éducation numérique laissent une empreinte indélébile dans l’histoire de l’informatique.

Mary Kenneth Keller fut bien plus qu’une religieuse et une universitaire. Elle était une visionnaire qui comprenait dès les débuts de l’informatique le potentiel transformateur des technologies pour l’éducation et la société. Son parcours – de ses vœux religieux à ses contributions pionnières en informatique – reste un modèle d’inspiration pour les femmes et les hommes de toutes générations.

BASIC : Le langage qui a démocratisé la programmation

Le langage BASIC (Beginners’ All-purpose Symbolic Instruction Code) occupe une place particulière dans l’histoire de l’informatique. Créé en 1964 par John G. Kemeny et Thomas E. Kurtz au Dartmouth College, ce langage de programmation a été conçu pour rendre l’informatique accessible à tous, en particulier aux étudiants non issus des disciplines scientifiques. Grâce à sa simplicité et à sa flexibilité, il est devenu un outil incontournable pour les apprentis programmeurs et a posé les bases de la démocratisation des ordinateurs personnels.

Les origines du BASIC

Dans les années 1960, l’accès aux ordinateurs était limité à une élite de scientifiques et de mathématiciens capables de maîtriser des langages complexes comme le Fortran ou l’ALGOL. Kemeny et Kurtz, convaincus que l’informatique devait être accessible à tous, ont conçu BASIC comme un langage simple, avec une syntaxe intuitive et des commandes proches du langage naturel. Pour faciliter son utilisation, ils ont également développé le Dartmouth Time-Sharing System (DTSS), permettant à plusieurs utilisateurs de travailler simultanément sur un même ordinateur via des terminaux distants. Le premier programme écrit en BASIC fut exécuté le 1er mai 1964. Rapidement, le langage s’est imposé comme une solution idéale pour les établissements scolaires et universitaires, grâce à sa facilité d’apprentissage et à son faible coût de mise en œuvre.

La montée en puissance avec les micro-ordinateurs

L’arrivée des micro-ordinateurs dans les années 1970 a marqué une étape décisive pour BASIC. De nombreux fabricants, tels qu’Apple, Commodore et Tandy, ont intégré un interprète BASIC directement dans le firmware de leurs machines. Cette décision a permis à des millions d’utilisateurs de se familiariser avec la programmation sans avoir besoin de logiciels supplémentaires. En 1975, Microsoft, alors jeune entreprise fondée par Bill Gates et Paul Allen, a lancé son interprète BASIC pour l’Altair 8800. Ce succès a établi Microsoft comme un acteur clé dans le domaine de la programmation. Avec des versions comme GW-BASIC et QBasic, BASIC a dominé le marché des ordinateurs personnels tout au long des années 1980.

Les principes fondamentaux de BASIC

Le succès de BASIC repose sur plusieurs principes clés :

  1. Simplicité syntaxique : Les commandes BASIC, telles que PRINT, INPUT ou IF…THEN, étaient simples à comprendre et à utiliser, même pour les débutants.
  2. Interactivité : Contrairement aux langages plus anciens qui nécessitaient un traitement par lots, BASIC offrait un retour immédiat aux utilisateurs grâce à son mode interprété.
  3. Portabilité : BASIC a été adapté à une multitude de plateformes, des grands systèmes universitaires aux premiers micro-ordinateurs.

Ces caractéristiques en ont fait un outil d’apprentissage idéal et un tremplin pour les programmeurs amateurs.

BASIC aujourd’hui : un héritage vivace

Avec l’émergence de langages plus modernes comme Python ou JavaScript, BASIC a perdu de sa popularité dans les années 1990. Cependant, son influence reste palpable. Des dialectes comme Visual Basic ont introduit des concepts modernes tels que la programmation orientée objet et restent encore utilisés dans certaines applications. Par ailleurs, des initiatives comme Small Basic et Basic-256 visent à réintroduire les principes fondamentaux de BASIC pour enseigner la programmation aux plus jeunes. En 2014, le Dartmouth College a célébré le 50ème anniversaire de BASIC, soulignant son importance historique et éducative.

BASIC a joué un rôle crucial dans l’histoire de l’informatique, en permettant à des générations d’apprendre la programmation et de découvrir le potentiel des ordinateurs. Bien qu’il ait été éclipsé par des technologies plus récentes, son impact demeure indélébile, et son esprit de simplification et d’accessibilité continue d’inspirer les outils éducatifs actuels.

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