La scène musicale mondiale pleure la disparition de Peter Yarrow, membre emblématique du trio folk américain Peter, Paul and Mary. Décédé à l’âge de 86 ans à New York des suites d’un cancer de la vessie, Peter Yarrow laisse derrière lui un héritage musical et militant qui a marqué toute une génération. Retour sur la vie et la carrière de ce géant du folk.
Né le 31 mai 1938 à Manhattan, Peter Yarrow a grandi au sein d’une famille juive engagée socialement. Dès ses études à l’université Cornell, où il obtient un diplôme en psychologie, Yarrow s’intéresse à la musique folk qui déferle alors dans le Greenwich Village de New York. Ce quartier devient rapidement le berceau de sa carrière musicale. Après une prestation remarquée au Newport Folk Festival, Yarrow est repéré par Albert Grossman, manager influent de la scène folk, qui lui propose de former un trio. Avec Mary Travers et Paul Stookey, le groupe Peter, Paul and Mary voit le jour en 1961. Leur son unique, porté par des harmonies vocales envoûtantes et une sensibilité à la fois traditionnelle et contemporaine, les propulse rapidement au sommet.
Dès leur premier album éponyme sorti en 1962, Peter, Paul and Mary s’imposent comme des figures majeures de la musique folk. Parmi les morceaux les plus célèbres, on retrouve « If I Had a Hammer », reprise de Pete Seeger et Lee Hays, qui leur vaut deux Grammy Awards. La chanson devient un hymne, à la fois aux États-Unis et à l’étranger, où Claude François en fait une adaptation française, « Si j’avais un marteau ». Le trio excelle dans l’interprétation de reprises qui transcendent les frontières culturelles. « Blowin’ in the Wind » de Bob Dylan, « 500 Miles », ou encore « Stewball », popularisée en France par Hugues Aufray, sont autant de titres qui témoignent de leur capacité à réinventer le patrimoine musical folk. Avec plus de 5 Grammy Awards et des albums ayant marqué l’histoire des charts, leur impact artistique est inégalé.
Peter, Paul and Mary ne se limitent pas à la musique. Leur engagement social et politique est une part essentielle de leur identité. Ils participent notamment à la marche historique sur Washington en 1963, où Martin Luther King prononce son célèbre discours « I Have a Dream ». Lors de cet événement, ils interprètent « Blowin’ in the Wind », devenant des symboles du mouvement des droits civiques et de la lutte contre la guerre du Vietnam. Leur musique résonne avec les aspirations d’une époque marquée par des bouleversements sociaux. Des titres comme « The Great Mandala » ou « Day Is Done » incarnent leurs convictions pacifistes et humanistes.
En France, Peter, Paul and Mary ont laissé une empreinte indélébile. Leur répertoire a inspiré de nombreux artistes français, de Richard Anthony (« J’entends siffler le train », adapté de « 500 Miles ») à Marie Laforêt (« Viens sur la montagne »). Leur influence se retrouve également dans des collaborations indirectes, comme l’album de reprises de Bob Dylan par Hugues Aufray.
Malgré son rôle de leader charismatique, Peter Yarrow a connu des zones d’ombre. En 1970, il est condamné pour avoir fait des avances à une adolescente de 14 ans. Après avoir purgé une peine de trois mois de prison, il est gracié par le président Jimmy Carter. Ce scandale entache sa réputation, mais Yarrow tente de se racheter en s’engageant dans des causes sociales et éducatives. En 2019, alors que le mouvement #MeToo gagne en ampleur, ces accusations refont surface, le contraignant à annuler des apparitions publiques. Malgré cela, ses contributions artistiques et militantes demeurent au cœur de son héritage.
Parmi les nombreuses compositions de Peter Yarrow, « Puff the Magic Dragon » occupe une place particulière. Inspirée d’un poème de Leonard Lipton, cette chanson mélancolique sur la perte de l’innocence a touché des millions d’auditeurs. Elle reste l’une des plus grandes œuvres de Peter, Paul and Mary, atteignant la deuxième place du Billboard Hot 100 en 1963.
Aujourd’hui, « notre dragon courageux est fatigué », comme l’a écrit Bethany Yarrow, fille de Peter. Son départ marque la fin d’une ère pour les amoureux du folk.
Peter Yarrow, avec Mary Travers et Paul Stookey, a ouvert des portes à des millions de fans vers la richesse du folk traditionnel et contemporain. Leur musique a été un pont entre les cultures, les générations et les idéaux. Si son parcours a été émaillé de difficultés, son impact sur la musique et la société reste incommensurable.
Avec le départ de Peter Yarrow, une page se tourne, mais son écho résonnera longtemps dans le cœur de ceux qui croient en un monde meilleur, porté par les mélodies et les messages intemporels du folk.
Photo : Folk singer Peter Yarrow performs « Where Have All The Flowers Gone? » on Thursday, April 28, 2016, at the LBJ Presidential Library (Flickr)
2 Commentaires
Superbe article Eric !
Merci. Heureux que l’article vous a plut !